Par Yves DUBERTRAND
" De petits bergers gardaient leurs troupeaux dans ces parages. Soudain, à leur grande surprise, ils virent une flamme brillante à travers les rochers; ils approchent et au milieu de ces flammes ne brûlant pas, ils découvrent une statue de la vierge. La statue est dès lors transportée dans l'église de la paroisse, mais elle revient d'elle même à l'endroit de la découverte. C'est là que l'on bâtit la chapelle."
Cependant des miracles ne tardent pas à se produire. L'un d’eux a donné naissance à la légende de la jeune fille sauvée des eaux, que nous connaissons tous.
La chapelle primitive était bien modeste, mais les merveilles s'y opérant attiraient de plus en plus de pèlerins, ce qui valut à Bétharram au XVème siècle, le nom de « Terre sainte».
La renommée du Sanctuaire ne cessait de grandir, lorsqu'en 1570, les protestants, maîtres de la région, proscrivent la religion catholique en Béarn.
Durant les guerres de religion
Dès lors, les processions de la Fête-Dieu sont interdites; les croix, les images des saints, tout ce qui touche de près la religion catholique est enlevé. Ces excès donnèrent lieu à l'intervention du pape Pie V et du Roi de France.
Le Béarn vécut les heures les plus sombres de son histoire. Notre village ne fut pas épargné par la tourmente, mais seul il se distingua entre tous par son courage et son intrépidité, car au dire de Marca (Président du Parlement de Navarre, intendant de justice, conseiller ordinaire et conseiller d'état), personne ne se fit protestant, malgré les souffrances qu'ils durent supporter pour conserver leur foi.
La restauration
Après le passage des troupes de Montgomery, le Béarn tout entier demeura sous la domination politique des protestants et ceci pendant près de trente ans. Toute l'administration était aux mains de leurs partisans; les paroisses étaient desservies par 80 pasteurs, assistés d'un conseil d'Anciens.
Seul mit fin à ces persécutions l'Edit de Fontainebleau, promulgué par Henri IV le 15 Avril 1599. Pendant ce temps, l'évêque de Lescar sollicita des lettres patentes de Marie de Médicis, l'autorisant à reconstruire la dévote chapelle. Sa confiance ne fut point trompée, en 1614 il recevait l'autorisation de la reconstruire. C'est cette chapelle que nous voyons presque tous les jours.
Mais les Lestellois ne restèrent pas inactifs, au contraire, ils s'empressèrent aussitôt de la restaurer. Ils relevèrent les murs calcinés, les recouvrirent d'une toiture provisoire et attendirent le jour où il leur serait donné d'y entendre la messe. La première qu'il y eut, fut entendue par une multitude de personnes, puisque le service divin fut suivi d'une prédication donnée sur la grande place du village (place Saint-Jean) devant un auditoire de plus de 5000 catholiques.
D'autre part, les terrains entourant la chapelle appartenaient aux habitants de Lestelle. Pour aider à son relèvement, ceux-ci firent don aux chapelains, de la colline et des taillis au pied de laquelle elle s'élevait. L'acte fut passé chez le Notaire à Montaut, en août 1616, et il imposait aux chapelains l'obligation de la résidence, afin d'y célébrer le service divin.
Des terres nouvelles pour les chapelains
Les chapelains acquirent des territoires plus importants. Le 12 Septembre 1635, ils acquirent aux habitants de Lestelle un moulin. Ce moulin avait été bâti sur le Gave par les Lestellois et il était administré par les jurats qui payaient de ce fait au vicomte souverain une redevance en blé.
Ayant besoin d'argent, ils le vendirent le 28 janvier 1574 au seigneur d'Igon pour 950 écus et un tonneau de vin. Celui-ci le vendit aux chapelains avec le vivier et les terres comprises dans l'enclos pour la somme de 1000 livres tournoi sols. En outre, une clause stipulait que les hommes et les femmes de Lestelle devaient une corvée de deux jours de travail pour l'entretien des digues et du moulin; ils se libérèrent de cela en payant 25 livres à la communauté.
Après 1640, les chapelains acquirent la prairie de Béthèréde et étendirent leur propriété jusqu'au ruisseau Saint Roch.
En 1633, les chapelains recevaient les lettres patentes du Roi Louis XIII. Elles confirmaient le don aux religieux de la chapelle et de ses dépendances, reconnaissaient les statuts et défendaient que l'on construise des débits publics sur l'avenue de la chapelle (actuellement avenue de Bétharram), jusqu'aux premières maisons lestelloises.
Une crue dévastatrice
La vie s'écoulait paisiblement jusqu'au printemps de 1678 où une crue subite du Gave emportait à la fois l'église, le cimetière du village et le pont. Malgré la misère, les Lestellois demandèrent en mai 1679 à rebâtir l'église. Le 31 Mai 1679, une fois l'autorisation accordée, ils vendirent des communaux et prélevèrent 6 F sur chaque maison et 600 F au pied de taille.
Le 13 Août, ils achetèrent à Jean Latisnère un terrain donnant sur la place pour la somme de 1500 livres nécessaires à la construction de l'église et un appentis destiné à servir d'école. Jean de Giraude de Lestelle, proclamé adjudicataire le 18 Juin 1679 s'engagea à faire les maçonneries. Les habitants du village s'engageaient à creuser les fondations, à assurer les charrois, à fournir le bois des charpentes.
La première pierre de l'église fut bénie par Maître Tarride, Docteur en Théologie, chapelain et curé de Lestelle. La bénédiction eut lieu en Mars 1682. Une fois l'essentiel terminé, en 1685, le sieur Donzelot offrit de peindre la voûte du chœur. Le sieur François peignit les murs.
En 1681, Maître Dencausse fondait la cloche de l'église.
En 1685, la sacristie et l'appentis pour l'école furent terminés.
En 1687, les entrepreneurs fleurirent le faîte de l'église et quittèrent le chantier.
Les chapelains durant ces travaux assistèrent les jurats, pourvurent en outre la sacristie d'ornements et l'autel d'un tabernacle. Les jurats pour les remercier, leur donnèrent trois journaux et demi de saligats. Dans une réunion du 17 Septembre 1681, les jurats déclarèrent:
«Il est juste d'entrer dans quelque sentiment de reconnaissance pour eux, afin de les entretenir à faire du bien à la communauté, comme ils ont fait jusqu'à présent ».
Le chapelain-curé et les jurats ayant conclu un accord avaient distribué aux familles contre rétribution le sol de l'église pour en faire leur sépulture. Les sommes perçues en vertu du règlement de 1681 permirent d'achever les constructions.
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